[PRATIQUE MOBILITÉ INTERNATIONALE – MI]

Mobilité Internationale et GEC (Global Employment Company) : l’exemple d’Arkema      

Arkema est un acteur majeur des matériaux de spécialités employant plus de 20 000 collaborateurs dans le monde. Ses matériaux de spécialités sont variés – polymères techniques, additifs, résines pour peintures ou adhésifs – et utilisés dans une multitude d’applications pour ses clients issus de secteurs diversifiés (automobile, aéronautique, cosmétique etc.).
Fort de sa politique d’acquisitions ciblées et de récents investissements industriels, le Groupe, essentiellement présent en Europe et aux Etats-Unis à sa création en 2006, est désormais plus international que jamais avec une présence au sein de 55 pays répartie de manière équilibrée entre l’Asie, l’Europe et l’Amérique du Nord. 
Le Groupe, qui compte aujourd’hui une population oscillant entre 70 et 100 expatriés, a choisi de gérer sa politique de Mobilité Internationale via une GEC – Global Employment Company.

Explications avec Alexis BOUDIER, Responsable Rémunérations et Mobilité Internationale 

Alexis, pourriez-vous vous présenter et nous parler de la gestion de la mobilité internationale chez Arkema ?

J’ai rejoint le Groupe Arkema en 2018 et suis depuis 2 ans Responsable Rémunérations et Mobilité Internationale. 
Le service Mobilité Internationale est intégré à la Direction C&B Corporate et est en première ligne pour accompagner la croissance d’Arkema à l’international en répondant à deux besoins : 
•    d’une part celui de constamment fournir au Groupe les experts dont il a besoin à travers le monde ;
•    de l’autre, celui de permettre le développement de Talents via une expérience à l’international (une recherche de diversité de nationalités, de cultures, de profils, clairement promue par le Groupe).
Notre service s’appuie pour sa gestion sur une GEC. 

Comment définiriez-vous une GEC et quelles sont les spécificités de celle d’Arkema ?

Une GEC ou Global Employment Company est une entité juridique à part entière, distincte des sociétés d’origine et d’accueil, permettant de regrouper la population en Mobilité Internationale. 
Quel que soit le pays d'origine ou d'accueil, le collaborateur obtient généralement un contrat de travail et une lettre d'affectation de l’entité GEC, et s'installe ensuite depuis son pays d'origine vers son pays d'accueil.
Les GEC sont généralement situées dans des pays favorisant une gestion simplifiée telle que la Suisse ou Singapour.  Leur gestion peut être soit directement effectuée par une équipe Mobilité Internationale en interne, soit confiée à un prestataire.

La GEC mise en place par Arkema est spécifiquement dédiée aux « expatriés » (ie tous les long-term assignments, quel que soit leur statut vis-à-vis de la protection sociale).
Elle est basée en Suisse et gérée par un prestataire externe, qui assure la gestion administrative et contractuelle, la paie (et refacturation associée) ainsi que la mise en place d’un cadre de protection sociale. Le prestataire suit par ailleurs les salariés au jour le jour tout au long de leur expatriation.

De notre côté, l'équipe Mobilité Internationale agit en tant qu’interface Corporate entre les expatriés, les managers et les équipes RH des deux pays concernés (origine et accueil).

Nous intervenons directement pour mettre en place les mobilités au départ et au retour, coordonnons l’action du prestataire et garantissons le déploiement conformément à la politique du Groupe : nous sommes en quelques sortes les gardiens du cadre !
 

Quels sont selon vous les avantages et les limites d’une gestion de la MI via une GEC pour les salariés ?

Les deux principaux avantages selon moi sont de : 
•    Garantir un cadre commun pour la population expatriée en termes de protection sociale, fiscalité, modalités de rémunération en centralisant les contrats d’expatriation.
Ce cadre nous permet d’avoir un traitement plus équitable de nos salariés, de limiter le nombre d’exceptions ou encore les disparités entre les pays qui peuvent impacter négativement les collaborateurs. 
•    Construire des packages de rémunération à partir du pays d’origine.
A la différence des politiques Local ou Local +, ce mode de fonctionnement est aligné avec la volonté affichée par la société de développer les Talents via une expérience à l’étranger tout en maintenant le lien avec le pays d’origine. Cela peut également permettre une meilleure gestion du retour (le salarié étant resté sur une logique de rémunération de son pays d’origine, le package du retour est moins complexe à gérer). 

En ce qui concerne les limites d’une gestion via une GEC, je dirais que le principal défi réside dans le fait de bien expliquer les tenants et les aboutissants aux collaborateurs concernés. 
•    En effet, certains points peuvent paraître complexes à appréhender, voire même abstraits, et surprendre (changement d’organisation, de monnaie etc.), alors que la mise en place d’une GEC ajoute un 3ème acteur dans les mouvements internationaux. 
•    De plus, le collaborateur se retrouve avec un statut assez distinct de ses collègues, n’étant salarié ni de son pays d’accueil, ni de son pays d’origine. 
Le rôle de notre service est donc d’accompagner les collaborateurs sur ces questions-là en amont : l’enjeu pédagogique n’est pas à minimiser ici !
 

Et pour la société ?

La centralisation au sein de la GEC permet de déléguer la gestion opérationnelle à notre prestataire. Ce modèle offre une structure robuste et nourrit le développement d’un pôle centralisé d’expertise interne, tout en permettant une flexibilité en cas d’expatriations successives ou de pays difficilement compatibles ! J’ai notamment quelques exemples de schémas inédits pour Arkema, que la GEC a permis d’appréhender de façon plus sereine, sans difficultés particulières (ex : un salarié brésilien envoyé en Malaisie). 
Je pense également à la mise en place d’un « noyau dur » international qui simplifie notre travail au quotidien et nous fait gagner du temps en limitant les exceptions et la multiplication de situations. Cela permet également de nous concentrer sur le maintien de la coordination entre le service Mobilité Internationale, notre prestataire et les RH des pays d’origine et d’accueil : les marchés n’ayant pas d’autonomie de gestion en MI, le rôle de l’équipe Corporate est amplifié afin de garantir le respect de la politique (dont l’actualisation et la modernisation sont des enjeux centraux).
L’enjeu pédagogique me semble également primordial pour la société : ce système de gestion étant très centralisé au sein du département MI, il est essentiel de s’inscrire dans une dynamique de transmission et de service, afin de donner accès à ces process et de faire gagner du temps dans la prise de décision pour les différentes parties prenantes internes (RH, managers). 

Quels sont les prochains enjeux au sein de votre équipe ?

Mis à part l’enjeu pédagogique déjà mentionné précédemment, nos enjeux sont :
•    Un enjeu d’amélioration du suivi en gestion de carrière de notre population expatriée – parfois paradoxalement « oubliée » –, en s’appuyant sur les équipes de Talent Management existantes au niveau du Corporate (notamment pour la gestion du retour). 
•    Un enjeu d’intégration des autres statuts MI qui ne passent pas par le système de la GEC afin de garantir le respect de la politique et l'équité de traitement tout en préservant l’autonomie des régions : en particulier, encadrer le développement des missions courtes - en visant à allier simplicité et compliance - ou encore l’émergence du télétravail international.
•    Enfin, un enjeu opérationnel afin de renforcer nos outils existants et faciliter la coordination avec nos différents interlocuteurs, notamment au niveau de la prise de décision sur des situations individuelles (les exceptions, toujours les exceptions...).


Le Cercle Magellan est l’un des moyens qui peut nous permettre d'avancer sur ce point, en échangeant sur les bonnes pratiques mises en place par des sociétés dont le fonctionnement est similaire au nôtre : gestion de la fiscalité, gestion des avantages en nature, animation d’un réseau (d’interlocuteurs régionaux, de managers, des expatriés eux-mêmes) … nos sujets de conversation présents et à venir cette année avec les membres du Cercle sont nombreux !